Un apercu de Nouvelle Caledonie
A la base une des principales raisons qui a amené l’entreprise pour laquelle je travaille a m’embaucher était qu’elle avait gagné un gros contrat d’inspection dans une mine de nickel prêt de Nouméa (30% des réserves mondiale sont en Nouvelle Calédonie) . Avoir quelqu’un parlant français aurait été un gros atout pour eux. Malheureusement ce contrat n’a jamais été concrétisé, et heureusement pour moi on m’a quand même gardé…
Malgré cet échec j’ai été formé a la dure théorie qui régule et gouverne l’inspection des réservoirs utilisés dans l’industrie, avec quelques uns de mes collègues, j’ai même passé un examen de certification que nous avons tout les neufs honteusement loupé, a cause d’un cours extérieur assez bidon (mais j’ai eu le score le plus haut, je suppose que bien que je ne connaissais rien des termes techniques utilisés deux semaines avant l’examen j’ai un peu de facilité a lire entre les lignes et trouver des infos cachées dans des codes de construction, ce qui aide quand ils totalisent environ 500 pages). Bref de l’eau coule sous les ponts, et il n’y a pas six mois de ça j’ai décidé de repasser ce fichu exam et d’obtenir la certification une fois pour toute, promesse de job dans des endroits plus sexy que Biloela (pour ne citer que le pire).
5 mois de bachotage non stop et j’obtiens enfin le sésame, je suis enfin (mais pas seulement) inspecteur certifie par API, l’American Petroleum Institute. Pendant ce temps on décroche un contrat avec Enercal, la société néo calédonienne d’énergie, et je suis envoyé avec un collègue expérimenté pour conduire l’inspection. Pendant ce temps la aussi, deux collègues se font licencier pour cause de ralentissement des autres activités… Je pense que l’investissement en temps pour avoir cette qualification m’a vraiment sauvé et m’a permis de ne avoir mes fesses sur le siège éjectable.
Ouf, smart move
Voila donc pourquoi, en ce Samedi 25 Mai 2013 je me retrouve dans un avion a destination de Nouméa, pour une excursion dans un petit morceau de France après pile un an passé en Australie. Petit morceau de France qui paradoxalement m’en éloigne encore un peu plus…
La première impression a l’atterrissage est que il fait chaud, et humide. C’est amplifié par le fait que depuis plusieurs semaines on se les gèle a Brisbane. Oui on a froid, avec des températures atteignant le chiffre incroyable de seulement 15 degrés en journées et 8 degrés la nuit… La navette nous amène a l’hôtel situe sur l’Anse Vata, plage située au Sud de Nouméa. Le chauffeur refuse de mettre la clim pour économiser l’essence. On pense a une blague jusqu’à ce qu’il en explique les raisons. Depuis quelques jours une crise sociale sévit a Nouméa a cause des prix élevés, et ainsi les dépôts sont bloqués. Beaucoup de stations services se retrouvent déjà a sec et le dénouement de cette situation est encore très incertain. Fatigués, l’ont ne suis la conversation que d’une oreille, bien loin de penser que cela pourrait nous affecter.
J’allume la tv de l’hôtel, bloque 5 secondes devant les infos, en français, et vais me coucher après un voyage fatigant.
Le lendemain nous retrouvons le client qui est chargé de nous conduire a Népoui, petit village situe a environ 3h30 de route. Tout se déroule comme prévu, on cherche le matériel, on a seulement 1 heure de retard ce qui est un petit miracle ici, quand le client nous annonce qu’un barrage érigé par des manifestants bloque la route au niveau de Poya, un petit peu avant Népoui. Il ne veut pas prendre de risques et repousse le trajet au lendemain, en espérant que les négociations qui se déroulent dans la nuit aboutiront a une accalmie.
Le lendemain on remet ça, et les informations distillées par les médias laissent supposer qu’un arrangement a été trouvé entre le gouvernement et les manifestants. C’est une impression confirmée lorsque le client nous annonce tout sourire que le barrage est levé et que plus rien ne nous empêche de rejoindre le site.
La route entre Nouméa et Népoui est magnifique, bordées par des montagnes dont les reliefs sont amplifiés par les ombres d’un soleil quand même assez capricieux. C’est ainsi sur tout le trajet, avec par endroits quelques cicatrices sur les flancs des montagne laissant apparaitre une terre rouge contrastant avec le vert omniprésent, vestige d’une activité minière omniprésente. C’est aussi le premier contact avec le chauffeur Calédonien lambda, en général traçant sa route a 140 km/h sur la nationale et doublant dans les virages… mon collègue est surpris et je sauve notre réputation en disant que non, ce n’est pas comme ça en France…
On passe aussi devant le barrage en cours de démolition…
On arrive dans l’auberge déposer nos affaires et le moins que l’on puisse dire c’est que la vue est magnifique, jugez plutôt.
Malheureusement si la vue est magique la chambre l’est beaucoup moins, et c’est je pense l’un des pires endroits ou j’ai du rester pour un job. C’est la dernière fois que l’on laisse le client s’en occuper… mon collègue tente de réserver un motel de meilleur standing mais malheureusement tout est plein, c’est donc a reculons que nous déposons les affaires avant d’aller a la centrale.
Elle est juste a coté, pratiquement sur la plage, les cheminées toute rouillées, l’aspect très industriel du site, qui parait presque a l’abandon vu l’état de rouille des équipements a cause de l’atmosphère marine contraste avec les environs. Si l’esthétique de la centrale, – dont les concepteur n’ont pas vraiment cherché a en faire une œuvre d’art – est en telle opposition avec le paysage, le tableau général qui se dresse devant moi lors de l’arrivée est je trouve assez élégant. Enfin bon il faut aimer… tout le monde ne prend pas des photos de raffineries comme moi car il trouve ça “cool” et impressionnant.
Un premier choc est de retrouver tout les termes que j’ai appris a utiliser au travail en Australie, mais en Français. J’enchaine les surprises en me faisant des réflexions du genre “ahhh c’est comme ça en français ahhhinnn”. Le deuxième choc c’est de parler travail en français. Le troisième choc c’est de me retrouver en position d’avantage par rapport a mon collègue malgré tout plus expérimenté que moi. Quand d’habitude je suis celui qui écoute les échangés avec les clients, ici j’assure la communication avec lui, devant mon collègue un peu impuissant. J’avoue que c’est assez jouissif.
Aller trêve de blabla.
On inspecte un réservoir de 10 000 tonnes de fioul lourd vidé pour l’inspection. Pour se faire une idée un navire comme le tristement connu ‘Amoco Cadiz’ transportait environ 234 000 tonnes de pétrole, soit 23 fois plus ce que le réservoir de la photo contient une fois plein.
On est présentés a l’équipe qui va nous aider, constituée de trois énormes masses, pur produits kiwi, 120 kilos chacun, ce qui fait qu’ils ne peuvent pas utiliser la nacelle a deux les pauvres, trop gros. Ils sont super sympas et nous auront bien aidé tout au long de l’inspection.
Un petit problème néanmoins, le plancher est crade et de époxy le recouvre encore par endroit, en l’état il est impossible de l’inspecter avec confiance et il faut donc le sabler. C’est un peu la panique chez le client, qui a mal lu le devis. Allez y trouver quelqu’un pour sabler un réservoir de 30m de diamètre en urgence… Le résultat est que une fois le toit inspecté on va devoir attendre que le sablage soit terminé, donc que l’on va devoir retourner sur Brisbane et revenir plus tard une fois ça terminé. Oh, c’est pas trop grave, justement il me manquait des points sur mon membership qantas…
On rentre donc sur Nouméa le lendemain, après avoir fait seulement environ 30 % du boulot. L’avion est trois jours plus tard et je pensais pouvoir profiter de mon temps libre pour enfin visiter Nouméa comme il se doit. C’était sans compter sur la nourriture locale qui a agressé mon estomac habitué a la bouffe australienne (pourtant pas vraiment exceptionnelles c’est le moins que l’ont puisse dire). Résultat une journée de perdue, cloué au lit, a vomir toute mes tripes. Fichu carpaccio.
Après le weekend sur Brisbane a me reposer (par exemple en rentrant a 4h du matin de boite) on repart en milieu de semaine suivante pour emmagasiner encore plus de frequent flyer points. Le ciel est toujours couvert, et comme la première fois nous conduisons pour arriver sur site au plus tôt. Cette fois ci rien a dire, tout est prêt et l’inspection se déroule sans accro aucun.
Trois jours plus tard l’inspection est terminée, un jour avant la date de retour prévue. Plutôt que de passer ma journée de libre a regretter d’avoir trop mangé la veille, comme la première fois, je prends un diner light, et le lendemain décide d’explorer les environs avec l’aide du 4×4 que le client a gracieusement loué pour nous. C’est un 4×4 Toyota, zéro option… c’est a dire que y a pas d’airbag et que faut fermer les portes une par une…
Un petit tour sur google map et le trajet est décidé, je vais aller en haut des montagnes qui surplombent Koné. C’est juste a cote et ça ne devrait pas être bien compliqué d’y arriver avant que la lumière du crépuscule ne se fasse de plus en plus rare.
La première partie du trajet est facile, le chemin est un peu torturé mais plat, et surtout il y a beaucoup de place pour attaquer la route de la façon la plus confortable qui soit pour moi et mes fesses. On ne peut pas en dire autant du reste, la topologie change complètement a une intersection quelconque, et l’ascension se poursuit par le biais de chemins étroits, défoncés et très pentus. La première caractéristique est importante car, si le chemin n’avait pas été aussi étroit j’en aurait profité pour faire demi tour après m’être dit que c’était du suicide. Mais voila c’était étroit, donc je n’ai pas eu d’autre choix que d’avancer, en espérant que chaque difficulté soit la dernière, ce qui ne fut pas le cas. Le chemin enchaine les virages en épingle a flanc de falaise et le moindre faux pas peut être fatal. Chaque virage est pire que le précédent, plus pentu, et nécessitant même pour le dernier de manœuvrer deux fois, et de reculer en prenant soins de ne pas trop reculer, pour que les quatre roues restent bien sur la route. C’est mieux pour une voiture, surtout un 4×4.
C’est les mains moites et le cœur battant que j’arrive au sommet. J’enlève mes tongs (car oui je conduisais en tongs). La vue est époustouflante, les montagnes semblent directement plonger dans l’océan, océan arborant une teinte turquoise lorsqu’il est protégé par les récifs coralliens.
Malheureusement le temps n’est pas a la contemplation, le ciel se fait menaçant et une averse serait pour moi synonyme de nuit au sommet, car une descente sur le chemin mouillé rendu glissant est tout bonnement hors de question. S’éterniser sur ce site m’amènerait soit a devoir expliquer a mon collègue pourquoi j’ai disparu une nuit entière, sans réseau, soit expliquer, et c’eut été plus compliqué, pourquoi la voiture s’est industrieusement retrouvée sur un arbre en contrebas d’une falaise au milieu de nul part. Je ne pense même pas a la troisième alternative…
Heureusement la descente se déroule sans encombre, si ce n’est que le premier virage a été la source de sueurs froides, ou je n’ai pu mettre ma confiance que dans la bonne adhérence des pneus.
La voiture arrive donc indemne a l’hôtel, si l’on oublie la terre un peu partout et la carrosserie dégueulasse.
Je suis retourne dans les environs le soir même pour profiter d’un ciel enfin dégagé, afin de prendre quelques photos du ciel nocturne.
Le retour sur Nouméa se fera la lendemain, et le retour sur Brisbane le surlendemain, tout les deux se feront sans histoire.
Ou moment ou j’écris je n’ai qu’une envie c’est d’y retourner… il y a du fromage, du saucisson et des Tim-Tam, donc c’est un peu le pays parfait.
PS: J’en profite pour annoncer l’arriver d’un successeur a mon canon 450d, je demande d’accueillir haut et fort mon nouveau canon 6d, qui promet de faire des photos encore plus folles que je manquerais pas de mettre sur ce blog très bientot!