Tough life of an engineer
ou “la dure vie d’un ingénieur”…
Le titre est à la foi ironique (et pas qu’un peu), mais aussi souvent véridique (et toujours pas qu’un peu). Voici un article relatant deux semaines passées sur site, où je vais expliquer ou du moins essayer d’expliquer le travail qu’on fait dans ces cas là. Pas de journée type, ni de semaine type… ce qui n’arrange pas mes affaires car je vais devoir écrire des articles différents à chaque fois que j’irais en déplacement, étant un peu paresseux bloguement parlant ces derniers temps.
Ou j’en étais déjà ? Ah oui, la dernière fois j’étais dans le backpacker à Brisbane.
Il est 10h30 le dimanche matin, et je me suis encore réveillé bien trop tôt, surtout pour un dimanche. Le jet lag est décidément bien plus dur à rattraper dans ce sens là que lors du retour d’Australie. Pire, je ne suis même pas sorti la veille (ce n’est pas comme ça que je vais trouver une australienne, ceux qui veulent que je rentre plus tôt ou du moins que je ne fasse pas ma vie ici vont être rassurés, avant d’être déçus car j’ai une bonne nouvelle à annoncer… patience). C’est à prendre au 2nd degré bien entendu.
La demoiselle de l’accueil vient me voir car mon collègue est déjà à l’entrée en train de patienter, avec 30 minutes d’avance. Bon tant mieux me dis-je, moi qui squatte internet depuis 7 heures du matin cela m’arrange plutôt bien de partir en avance.
Les affaires sont rapidement transportées dans la voiture de location garée devant le bâtiment.
Ah je vais un peu trop vite, j’ai oublié de faire la description de mon collègue, ce qui peut être utile pour la suite sachant que je vais passer deux semaines avec lui, à travailler ensemble, faire le trajet ensemble, manger ensemble, dormir ensemble.
Il s’appelle Don (on est bien avancé n’est-ce-pas), il a 25 ans et est australien, habitant la banlieue de Brisbane. Il est material engineer, et est dans l’entreprise depuis environ 3 ans. Pour ceux qui suivent depuis le début c’est la même personne avec qui je suis allé à Gladstone la première fois il y a de cela quelques mois. Il est assez grand, porte des lentilles pour éviter de mettre des lunettes qui lui donnent un air intelligent, et est assez cultivé, curieux, et s’intéresse à la bourse (ASX, le marché australien). Le dernier point n’est pas vraiment quelque chose qui le rend fou de joie en ce moment, mais passons. Petit détail marrant il dit tout le temps “But hummm”, comme dans How I met your mother.
Le Don sus-cité m’aida donc à transférer mes bagages, qui pour une raison que j’ignore et que j’aimerais bien connaitre, sont de plus en plus lourd. C’est surement un syndrome du passage de backpacker à sédentaire, on accumule les m… conneries. Mais qu’est ce que je fous avec mon masque et tuba et mes push up bars… voyons…
Ceci fait nous partîmes aussitôt pour Gladstone, pour un road trip de 7 heures environ, traversant la magnifique Sunshine Coast sans en voir une seule miette. Frustrant.
La voiture est comme la dernière fois, un break Holden avec un gros moteur qui pousse fort. J’ai trouvé la même sur internet, pour illustrer un peu car certains regardent que les images et sont déçus quand ils viennent ici. C’est même la même couleur, c’est dire si c’est un blog de qualité que je fais…
Le soucis de l’exactitude est omniprésent dans ce blog je tiens à le préciser !
Trêve de débilités je reprends mon récit car j’en suis encore qu’au début et à ce rythme là je vais rester veiller tard à écrire mon article (sachant que les accents se font en tapant alt+0233 par exemple, cela n’aide guerre) et je ne vais pas me réveiller demain.
Le voyage se poursuit. Un arrêt est prévu chez la mère de Don qui nous a préparé un succulent curry (Numéro 1/4). J’aurai l’occasion de gouter aux puppodum , mais bon c’est Indien et pas Australien donc pas trop d’intérêt ici. C’est très bon par contre !
La route se fait sans histoire, rythmée par la radio triple J, et le son des lives en direct de Splendour In The Grass, gros festival du moment. J’ai souris en entendant la chanteuse briochine Yelle y chanter et donner une interview. Pauses pipi, pauses essence, pauses changement de conducteur, bref un voyage terriblement intéressant. On arrive vers 18h30 à Gladstone (faut vraiment que j’écrive un article sur cette ville, quel fainéant je fais). Contrairement à la fois précédente, ou nous avions logé dans des chambres séparées au Quest ; hôtel vraiment pas mal avec tout ce qu’il faut ; cette fois nous logeons aux Portside appartments, un peu plus loin.
L’entreprise prend soins de nous c’est peu de le dire, c’est un appartement avec deux chambres et deux salles de bain, un grand salon avec cuisine complète et balcon. Accès internet wifi illimité (mais impossible de télécharger, les filous) aussi fournis. On a prévu d’y rester jusqu’au samedi matin. Mais hop il est temps de se coucher demain c’est la reprise après les vacances passées bien trop vite (hein déjà fini…ça avait commencé?)
On rentre dans le vif du sujet, et ce qui va suivre va peut être est assez technique, et intéressant, ou pas. Je vais expliquer ce qu’on fait en déplacement. Comme ça la prochaine fois qu’on me posera la question je filerai le lien du blog…
En l’occurrence pour ce job ci, cela consiste à analyser les microstructures des métaux constituant le réseau de tuyauteries dans lequel circule l’eau ou la vapeur de la centrale électrique. Vous avez le droit de relire une deuxième fois la phrase, j’ai fait pareil alors que pourtant c’est moi qui l’ai écrite.
La centrale ou nous nous trouvons est la centrale NRG de Gladstone, fonctionnant avec cette merveilleuse source d’énergie renouvelable (sur des période de quelques millions d’années juste) qu’est le charbon.
En gros, pour résumer le charbon est brulé dans un barbecue géant, et réchauffe l’eau qui circule dans des tuyaux qui vont et viennent dans la chambre de combustion. La vapeur générée va ensuite passer dans une turbine, faire tourner un générateur (une dynamo géante) pour produire de l’électricité. Après avoir parcouru la turbine il y a refroidissement par eau de mer (nécessaire d’un point de vue thermodynamique sachant que le rendement dépend en partie de la différence entre la température chaude et froide) et le cycle recommence. Pour illustrer voila le principe général, on voit que l’eau passe plusieurs fois au niveau de la turbine donc c’est un peu plus compliqué mais le principe est là.
Aller je vais détailler un peu c’est pas comme ci je devais me lever à 6 heures demain…
C’est tiré de la doc disponible sur le site internet de NRG Gladstone.
1. Coal arrives on site by train and is dumped onto a system of conveyor belts to be checked and weighed before being moved to
the coal bunkers or the stockpile.
2. The coal is dispersed to and from the stockpile by two stacker reclaimers at a rate of 800 tonnes per hour.
3. The coal travels on conveyor belts.
4. Coal transfer tower.
5. Coal bunkers, where coal is fed into pulverising mills.
6. At the pulverising mills the coal goes through pulverisers and crushed into a fine granular state by crusher hammers. This
granular coal then passes through a two-stage pulverising process: first it gets rubbed on coal pegs to reduce the particle size, and
then it is rubbed on other coal until the right minute particle size is reached.
7. Air Inlet: An electric air heater is used to completely dry the coal. The coal and hot air mix in the chute to the mill, and all the
moisture is driven off as steam in the crusher-dryer section of the pulveriser.
8. The forced draught fan forces air through pre-heaters.
9. Air pre-heaters.
10. Hot air duct where hot air is directed to burners or pulverising mills.
11. Burners.
12. Furnace, where coal mixes with hot air and burns at high temperatures.
13. Tubes inside the boiler. (Heat produced in the boiler raises the temperature of water circulating in the tubes to produce steam.)
14. Steam drum where steam passes through at high pressure (16,890 kilopascals)
15. Steam is heated further in superheater.
16. Steam is fed through high pressure cylinder of the steam turbine at 541°C, returned to the reheater and then passed
through the intermediate and low pressure cylinders of the turbine. (The steam turbine converts steam energy into mechanical
energy in the form of a turning rotor).
17. Intermediate and low pressure cylinders.
18. Reheater.
19. Steam cooled in condenser.
20. Seawater from Auckland Inlet is used to cool steam in the condenser.
21. Feed pump pumps condensed steam (condensate) through the economiser.
22. Condensate pumped through the economiser goes back to the steam drum (14) to be reheated.
23. Combustion gases pass through the air preheaters to the fabric filters consisting of 7,500 bags that remove any ash dust
particles before discharging it up the stack.
24. The induced draught fan forces cleaned gases into the main flue and out through the 153 metre chimney.
25. Chimney.
26. Rotating alternator converts mechanical energy into electrical energy, generating electricity.
27. Generator transformer converts electricity to high voltage for connection to state power grid.
Je ne prend pas la peine de traduire je pense que google s’en sortira très bien.
Pour situer on va travailler principalement là ou il y a le numéro 18. C’est au septième étage, tout en haut. L’endroit s’appelle penthouse, mais ça n’a vraiment rien de sexy, ça s’appelle juste comme ça car c’est un peu le dernier étage du bâtiment, et c’est la que se trouvent les conduites de vapeur qui transitent dans la chambre de combustion. Les concepteur de la centrale ont dû vouloir faire de l’humour en choisissant ce nom, la preuve:
Alors que normalement c’est plutôt ça:
Ou même ça…
Mais je m’égare un peu là.
Il y a plein de petits tuyaux qui rejoignent d’autres plus grands, et les soudures sont inspectées de fond en comble. Une équipe fait des tests non destructifs et nous des analyses de microstructure.
Concrètement on polit la surface comme un miroir, on fait une attaque chimique, puis on fait un moule de la surface avec un plastique spécial appliqué à l’acétone pour voir les grains au niveau du matériau et de la soudure, à la recherche de fissures ou défauts. En faire une prend environ une heure (et coute bonbon au client). On doit en faire 125 en deux semaines, et deux semaines ce n’est pas de trop tant la tache est vaste. Une fois terminé on fait un test de dureté au niveau de la soudure et du matériau parent. L’échantillon prélevé est ensuite analysé au microscope jusqu’à x500. C’est un peu comme un TP de métallurgie, sauf qu’on est payé.
Quand je dis que l’endroit n’a rien de sexy je pèse mes mots… comme on le voit sur la photo c’est un endroit accessible avec une échelle, plein de poussière, ou règne habituellement (hors shutdown) une température de plusieurs centaines de degrés. Pour corser le truc les tuyaux forment une vraie prison et y évoluer est compliqué. Je vous dis pas la galère pour bosser quand on peine à bouger, et qu’en le faisant on déplace de la poussière qui ruine tout le process (le prélèvement en lui même s’appelle replica)… faire tomber ses outils entre les tuyaux c’est aussi assez chiant.
Les journées commencent à 7 heures et finissent à 19 heures, au début on trouve le temps long mais on s’y fait vite, puis après les journées de 8 heures paraissent presque être des vacances.
Après une semaine à ce rythme soutenu place au farniente, avec le samedi en fin d’apres midi départ directement après le boulot pour Agnes Water et 1770 (c’est bien une ville oui, d’ailleurs faut aussi que j’écrive un article la dessus…). Le week end fait du bien après avoir passé la semaine dans des endroits plein de pousieres, eclairés à la seule lueur de la lampe frontale. Mais à choisir je prèfere largement cela que travailler en bureau. Le fossé entre les deux environnements (semaine et weekend) est si grand qu’il fait apprécier le weekend à un niveau mille fois plus intense.
Au programme pour le court weekend sejour à Agnes Water, en appartement du même acabit que la dernière fois, plage, et restaurant. On n’a pas trop envie de repartir après ça !
Mon collègue, qui se préoccupe de mon éducation australienne, a eu la bonne idée de préparer un breakfast typiquement australien le dimanche. Haricot, bacon, toast, oeufs, champignon, avocat… c’est assez different des petits déjeuners sucrés qu’on a l’habitude d’avoir en France (le cliché café et croissant à la vie dure), mais c’est succulent.
Après midi à la plage suivie d’insultes d’amis sur facebook après avoir posté une photo du beau temps quand il pleuvait en France. C’est vrai que ce n’est pas sympa…
Le soir venu il est temps d’aller shooter le coucher de soleil et d’ensuite aller au restau pour clôturer un weekend assez peu remplit mais fichtrement reposant (et en ce moment c’est tout ce que j’en demande)
La deuxième semaine est peu différente de la première. On terminera le travail le vendredi midi, avec grand soulagement. La question de rentrer directement à Brisbane se pose mais cette solution est vite écartée au profit de la fête d’anniversaire (déguisée mar plich) d’une des alternantes de l’entreprise. C’est bien mieux que d’avaler du bitume en somnolant.
Du coup le lendemain nous étions en forme pour faire la route.
Non, en fait pas du tout. Mais alors pas du tout. Entrainé par l’ambiance on a finit en boite, à boire possiblement plus que de raison, sachant qu’une des amies se faisait un point d’honneur à ce qu’on soit toujours rassasié.
Ainsi le lendemain la route fût un vrai calvaire, mais heureusement ça va mieux maintenant! C’est ma première soirée australienne, dans le sens soirée privé avec seulement des australiens et aucun backpackers. Très bonne soirée en tout cas, on s’est bien amusé.
Là je suis maintenant rentré à Brisbane (ce qui me trahi, non je n’ai pas écris l’article en une seule fois et j’ai fini par me coucher quand je devais me lever à 6 heures pour être un minimum en forme quand même). Je pensais chercher maintenant un appartement, mais les évènements en décident autrement, et je suis mobilisé pour une inspection à Port Augusta, à 3 heures de route d’Adélaïde. Celle ci va durer un mois, et mobiliser un nombre impressionnant de personnel pour faire en tout prêt de 1600 replicas, contre 125 à Gladstone. Comme le dit mon collègue, it’s gonna be baaaaddd. J’espère seulement que j’aurais le temps de visiter un peu le coin, on a déjà prévu de faire une virée dans le désert tout proche, et en profiter pour prendre des photos du ciel étoilé. Les journées de “seulement” 10 heures devraient nous permettre d’avoir un peu plus de temps pour nous.
Bonus: bonne nouvelle. J’en parlait tout à l’heure, j’ai eu mon visa 457, mon sponsorship!! Je ne m’attendais pas à ce que ça arrive si vite, et je suis super content. Ca ne va pas changer grand-chose au quotidien, mais maintenant je vais pouvoir rester 4 ans, et aussi faire une demande pour la LAFHA, living away from home allowance, histoire d’avoir encore plus d’argent…
Bonus number 2: j’ai fait l’acquisition de nouveaux objectifs pour mon reflex, un canon 50mm 1.8 et un Tamron 70-300 VC USD, les photos de la centrale ont été faites pour certaine avec le premier, tandis que le second devrait être recu d’ici peu. Il va donc y avoir plein de nouvelle photos prochainement ! C’est fou quel dévouement j’ai pour ce blog et ses photos !